Halte aux Méduses en Tunisie: Quand l'Ecologie Prend Encore un Coup

12 août 2014

Halte aux Méduses en Tunisie: Quand l'Ecologie Prend Encore un Coup

Je suis parti tôt le matin faire du snorkeling avant le réveil des vagues et des méduses. La plage de Sousse est un régal tôt le matin. L’eau fut calme comme de l’huile et limpide comme de l’eau de roche. Les sensations de l’enfance me sont revenues Ah ! Pour une fois on pouvait observer le fond à partir d’une trentaine de mètres de profondeur. J’ai effectué une traversée d’environ 500 mètres et je m’étais arrivé à un constat effarant.

Outre les bouteilles et les sachets en plastique qui font de la Méditerranée une mer poubelle (ce ne fut jamais le cas il y a une dizaine d’années pourtant), j’ai observé lors de ma traversée au moins 300 méduses du type Olindias, petites de taille mais très urticantes .

Ce ne fut guère un problème pour moi lors de ma traversée aller. Les méduses dormaient au fond de la mer et j’ai pu observer leur beauté. Dire que Tristan a affirmé que pour les les Arabes, la méduse était considérée comme « une incarnation d’anges superbes et venimeux, ou encore l’âme de femmes défuntes revenues sous cette forme pour tenter les humains ».

Cependant, au retour, j’ai dû slalomer pour éviter une eau truffée de ces bêtes gélatineuses. Ce qui est inquiétant est que, jadis, ces Olindias même au mois d’Août, n’étaient pas aussi nombreuses et aussi présentes dans les eaux semi-profondes.

De nombreuses études « relatives au zooplancton gélatineux ont montré depuis quelques décennies des changements drastiques dans la fréquence et la durée des blooms de méduses dans le monde, en Méditerranée et en Tunisie (Arai, 2001 ; Purcell, 1991, 2003, 2007; Lynam et al, 2004 ; Cury et Miserey, 2008. Richardson et al, 2009 ; Daly Yahia et al, 2010 ; Brotz et al, 2012 ; Boero 2013). Il semble que nous sommes dans une période de « Changement Global de Régime » d’un océan de poissons vers un océan dominé par les méduses ». Voir Méduses, Tunisie.

En effet « Lorsque les méduses prolifèrent, étant donné que la plupart sont carnivores, leur impact trophique se répercute sur l’ensemble de la chaine alimentaire marine y compris lorsque ces dernières consomment d’importantes quantités d’œufs et larves de la plupart des animaux marins en particulier les poissons. Les impacts s’observent aussi sur la pêche par le colmatage des filets, sur le tourisme et la santé publique par les piqures et envenimations provoquées pouvant parfois nécessiter des hospitalisations et être plus rarement mortelles.» Ibid.

La page Facebook Méduses, Tunisie confirme que les causes probables favorisant la prolifération des méduses se résument par les points suivants :

1- Le réchauffement climatique qui réchauffe et stratifie les eaux marines de surface créant des conditions écologiques plus favorable aux développements des méduses qu’aux poissons.

2- L’eutrophisation des eaux côtières et lagunaires qui entraîne la prolifération excessive du phytoplancton suivi d’une importante dégradation de matière organique accompagnée d’un déficit en oxygène dans la colonne d’eau qui fait fuir les poissons mais dont les méduses peuvent s’accommoder.

3- La surpêche qui entraîne la réduction des grands prédateurs marins et des compétiteurs des méduses.

4- Modification des habitats côtiers avec la création de substrats (brise lame, marine, ports …) favorable à la fixation de polypes (forme benthique fixée de certaines méduses).

5- Le transfert biologique et l’introduction d’espèces exotiques et/ou invasives par les eaux de ballast ou sur les coques des embarcations et navires. »

Il est peut-être temps de sensibiliser les citoyens et les pêcheurs de l’importance d’une biodiversité équilibrée pour une protection meilleure de la Méditerranée, une prise de conscience de l’impact du changement climatique sur la biodiversité marine et sur la prolifération des méduses et pour la pratique d’une science citoyenne. Préserver notre mer, fait partie de la préservation de notre pays et de nos vies.

Je salue dans ce contexte le projet E. Med-Jellyrisk visant à renforcer l'approche de gestion et d'atténuation des mesures contre les impacts de la prolifération. Plusieurs actions de la partie Tunisienne du projet ont été engagées comme le détaille la page Facebook Méduses dont la présentation d’une application smartphone, l’organisation des workshops, les campagnes de sensibilisation, la formation des équipes de gestion etc. Une chose que j’apprécie énormément est l’emploi des médias sociaux dans ces campagnes. C’est vrai que l’lorsqu’on est un digital native, on pourrait changer le monde.

Néanmoins, les collectivités locales et les autorités publiques doivent faire beaucoup plus en matière de l’écologie marine avant qu’il ne soit trop tard.

Dans la mer Méditérranée, il existe environ 478 espèces sur 3800 espèces dans le monde. Cette affiche détaille les espèces les plus présentes en Tunisie.